Call for Papers—Culture/Identity/Politics: Éloge de la créolité, Twenty-Five Years On

Repeating Islands

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The Winthrop-King Institute for Contemporary French and Francophone Studies at Florida State University announces an International Conference—“Culture/Identity/Politics: Éloge de la créolité, Twenty-Five Years On”—to be held on October 21-23, 2014. The deadline for proposals is March 1, 2014.

Confirmed Speakers: Dominique Chancé (University of Bordeaux), Françoise Lionnet (UCLA), H. Adlai Murdoch (Tufts University), Richard Price (College of William and Mary), Sally Price (College of William and Mary)

Description: Since its publication in 1989, Éloge de la créolité has had decidedly mixed fortunes: generally received with enthusiasm on its first appearance, it rapidly became very controversial and has subsequently been widely critiqued to the extent that one wonders whether it retains any capacity at all to illuminate the cultures of Caribbean and Creole societies. To mark the 25th anniversary of its publication, this conference poses that very question, and foresees three broad areas of discussion: first, the fortunes of…

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Opera: A Heavy Weight to Bear

A strange coincidence: one of my former teachers from New Orleans, Terence Blanchard, premiered his new opera about Caribbean-born boxer Emile Griffith in my former hometown of Saint Louis, MO.

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Terence Blanchard’s first opera, “Champion,” is an ambitious work, both for its music and its contemporary theme—as Heidi Waleson writes in this review for The Wall Street Journal.

Mr. Blanchard, renowned as a jazz trumpeter and a composer of movie and Broadway scores, teamed up with playwright and filmmaker Michael Cristofer to tell the story of Emile Griffith, the Caribbean-born champion boxer who, in a notorious 1962 televised fight, beat his opponent, Benny “Kid” Paret, into a coma; Paret died 10 days later. “Champion,” which was given its world premiere by Opera Theatre of Saint Louis earlier this month, uses jazz, opera and musical theater elements to explore the life of a man perpetually at odds with himself. A closeted homosexual and not naturally aggressive (he would rather make hats), the eager young immigrant is pushed into a world that is all about machismo, and becomes haunted by the…

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Gwoka et atonalité: une question de contexte

Le guitariste Gérard Lockel, inventeur du gwoka modènn et le premier musicien à théoriser le gwoka, a écrit dans le livret accompagnant son premier disque (1976) que le gwoka est une musique atonale-modale. Depuis le débat fait rage en Guadeloupe entre ceux qui, d’une part, acceptent la déclaration de M. Lockel et adaptent ses théories et ceux qui, d’autre part, insistent que le gwoka ne se définit pas simplement par des questions de gammes. Sans vouloir régler ces débats ou même définir le gwoka (les guadeloupéens n’ont pas besoin de moi pour ça), je souhaite cependant apporter mon point de vue de musicologue.

Tonalité, modalité, atonalité: ça veut dire quoi? 

Il me semble important de commencer par reproduire le texte de M. Lockel:

« Comme le ‘GRO KA’ TRADITIONNEL dont il est issu, le ‘GRO KA MODEN’ est une musique atonale, modale et qui se pratique dans une gamme : LA GAMME ‘GRO KA’. C’est-à-dire que cette musique n’a rien à voir avec les lois fondamentales de la science musicale classique occidentale. Elle rappelle beaucoup plus de par ces caractéristiques, les formes musicales, afro-asiatiques. C’est une musique d’improvisation, qui se développe à partir d’un mode, mode qui donne naissance à une forme de mélodie, qui exprime le sentiment musical du peuple guadeloupéen. D’autre part, la gamme ‘GRO KA’ dont nous parlons, peut être comparée à celle créée, par le moine italien Guy d’Arezzo au début du XIe siècle de l’ère chrétienne, pour le développement de la musique occidentale. C’est le fameux ‘do, ré, mi, fa, sol, la, si’ que le Guadeloupéen connait bien pour l’avoir rabâché sur les bancs de l’école. »

Dans ce paragraphe, le grand guitariste guadeloupéen oppose donc le gwoka, qu’il décrit comme atonal et modal, aux lois fondamentales de la musique classique occidentale, c’est à dire la tonalité. Je dois bien avouer que ces propos sont assez déconcertants pour le musicologue que je suis. Pour comprendre pourquoi, il faut d’abord se rendre compte que les termes tonalitémodalité et atonalité n’ont pas vraiment de sens stricts qui les opposent. Prenons la modalité, terme ambigu s’il en est. A l’origine, l’expression fut utiliser pour décrire la musique religieuse du Moyen-Age et de la Renaissance. A partir du XIXème siècle, en parallel avec l’expansion colonialiste européenne et le développement de la musicologie comparée, le concept de modalité a aussi servi à décrire les gammes de musiques non-européennes, par example les ragas indiens. Au XXème siècle, les modes peuvent décrire toutes sortes de gammes musicales: les modes ecclésiastiques (lydien, mixolydien, aeolien, etc.), les modes majeurs et mineurs de la musique classique européenne, tout comme l’organization de base des mélodies iraniennes ou hindoustani.

Au sens large, il y a donc peu de différences entre la tonalité et la modalité puisque toutes les deux peuvent servir à décrire l’organisation systématique et hiérarchique de notes de musique au sein d’échelles de sons. Au sens restreint, le système tonal régit la musique classique occidentale entre le XVIIème et la fin du XIXème siècle. Il faut bien comprendre que le système tonal est un système total qui régit non seulement l’organisation de notes au sein de gammes, mais aussi l’interaction de ces notes au sein de mélodies, d’harmonies (c’est à dire des sonorités qui résultent lorsque plusieurs sons sont produits simultanément), ainsi que l’organisation complète d’une oeuvre de musique: par example, la structure d’un mouvement symphonique (sonate, rondo, etc).

Le système tonal a évolué à partir du contrepoint de la Renaissance, raffiné au XVIIème siècle par J.S. Bach et ses contemporains. A la base du système tonal est une hiérarchie au sein de laquelle une note, la tonique, agit comme un centre de gravité. Les autres notes, qu’on les arrange en échelle de sons ou en mélodie, se distinguent en fonction de leur capacité à s’éloigner ou se rapprocher de la tonique. Certaines notes de la gamme tonale, comme la dominante ou la sensible, subissent très fortement la force d’attraction de la tonique. D’autres, comme la sous-dominante, sont plus distantes: elles ont tendance à passer par une note intermédiaire avant d’atteindre la tonique. Donc, une musique est dite tonale même si elle n’a pas d’accords joué, par exemple au piano.

Le concept d’atonalité est très contesté en musicologie. Il n’a de sens qu’en opposition aux règles strictes, en particulier en ce qui concerne le contrepoint, qui ont régit le système de composition tonale jusqu’à environ 1900. Cependant, il existe très peu de musiques dont l’organisation des sons n’obéisse pas de façon plus ou moins abstraite à un système hiérarchique qu’on pourrait décrire comme modale, au sens large. Même le système dodécaphonique n’est pas vraiment atonal. Pour les historiens de la musique, une musique ne saurait être à la fois atonale et modale. Pour les ethnomusicologues, qui étudient les musiques non-occidentales, l’atonalité ne présente aucun intérêt puisque, d’abord, elle exprime avant tout un rejet du système tonal occidental, et ensuite, elle n’apporte rien à la description des systèmes qui gouvernent l’organisation de mélodies et d’harmonies de part le monde.

Le gwoka traditionnel est-il une musique atonale, modale, ou tonale?

Si les définitions de la tonalité et de la modalité ont servis des buts différents à différentes époques, il peut être difficile de déclarer, avec un minimum d’autorité, que le gwoka est une musique soit tonale, soit modale. Ce qu’il y a de certain, c’est que pour l’ethnomusicologue, de dire que le gwoka serait atonal ne servirait pas à grand chose. (J’insiste bien qu’il s’agit là de mon point de vue d’ethnomusicologue; d’autres, qu’ils soient musiciens ou militants culturels, peuvent avoir d’autres motivations. Je reviendrai là dessus plus loin.) Pour moi, il est plus intéressant de comprendre comment sont organisés les chants traditionnels.

Danse lors d'un léwòz

Le dialogue s’installe entre dansè, tanbouyè et chantè.

Pour ceux qui ne sont pas familiers avec la musique guadeloupéenne, le gwoka est une musique où un ensemble de tambours accompagne le chant et rythme la danse. Ces trois éléments sont complètement imbriqués les uns dans les autres. Ce qui fait la beauté du gwoka, c’est le dialogue entre tanbouyè (percussionnistes), chantè (chanteur soliste), répondè (choeur), et dansè (danseur). A la base du gwoka est un certain nombre de formules rythmiques jouées par les tambours. (On dit fréquemment qu’il y en a sept même si la réalité est un peu plus compliquée que ça.) Chaque formule rythmique est associée à des pas de danse bien précis ainsi qu’à certains types de mélodie. En généralisant, on observe que certaines gammes ont plus de prépondérance dans certains contextes rythmiques. Par exemple, les mélodies accompagnées par les rythmes de toumblak ou de léwòz utilisent souvent des gammes pentatoniques, ou des cellules de quatre notes extraites de ces même gammes. En revanche, les mélodies accompagnées par les rythmes de graj et de woulé ont recours le plus souvent à des gammes heptatoniques (sept notes) qui s’apparentent à des gammes diatoniques majeurs ou mineurs. C’est le cas, par exemple, d'”Eloi”, mélodie de graj bien connue.

Réponse du chant traditionnel "Eloi" transcrit à partir d'enregistrements de terrain.

Réponse du chant traditionnel “Eloi” transcrit à partir d’enregistrements de terrain.

Quelque soit la gamme utilisée, on remarque que les mélodies de gwoka adhèrent généralement aux lois qui régulent le système tonal: les differentes phrases mélodiques commencent et s’arrêtent sur des notes clés qui inscrivent les relations entre la sous-dominante, la dominante, et la tonique. C’est le cas d'”Eloi” mais c’est aussi le cas, par exemple, de la section improvisée de l’enregistrement de “Chat ka tété rat” par Robert Loyson. Bien que la mélodie principale soit basée sur une gamme pentatonique, Loyson improvise une longue section en oscillant autour de la dominante (si bémol tant la “tonalité” de mi bémol pentatonique mineur). Il signale la fin de son improvisation, et le retour des choristes, en retombant sur la tonique. De même, dans “Robertine”, le chanteur Chabin improvise un bon moment en utilisant une mélodie qui consiste d’un arpège d’une triade majeur et d’une descente diatonique depuis la dominante jusqu’à la tonique.https://tanbouolwen.files.wordpress.com/2013/06/robertine.mp3 En conclusion, l’ethnomusicologue que je suis, propose de décrire le gwoka comme une musique avant tout modale qui utilise beaucoup de figures caractéristiques des musiques populaires influencées par le système tonal. En tout cas, c’est ce que me permettent de conclure mes analyses à partir d’enregistrements de terrain et des disques disponibles sur le marché. Est-ce-que le gwoka s’est toujours chanté comme ça? Malheureusement, nous ne disposons pas de preuves scientifiques qui permettent de répondre à cette question.

Alors, pourquoi dire que le gwoka est une musique atonale-modale?

M. Lockel se serait-il trompé lorsqu’il a écrit que le gwoka est une musique atonale-modale? L’homme est bien trop fin musicien pour que ça soit le cas. Pourquoi donc cette déclaration? Il y a, à mon avis, plusieurs possibilités. Il est possible, dans un premier temps, que le guitariste ait entendu certains chanteurs dans son enfance qui utilisaient d’autres gammes que celles qui sont les plus communes aujourd’hui. Peut-être même a-t-il eu la bonne idée d’enregistré ces morceaux? Dans tous les cas, il est certain que, dans le gwoka traditionnel, on ne fait pas grand cas de la tonalité. La justesse, comme l’entendent les musiciens de conservatoire, n’est pas primordiale même si elle contribue à la lokans du chanteur. Les choristes harmonisent librement, adaptant la mélodie à leur registre vocal et conservant ainsi leur expression individuelle au sein du groupe, une caractéristique partagée de part la diaspora africaine. De même, lorsqu’ils se relaient, les solistes bougent eux aussi la mélodie pour accommoder leur propre voix. C’est surtout le cas lors des chants de veillée. Dans tout ça, le centre tonal est maltraité, constamment réinterprété, et donc déstabilisé. Si les lois de la tonalité aident à comprendre l’organisation des mélodies de base dans le gwoka, elles ne régissent en aucun cas la pratique vivante de cette musique. Comme l’a dit M. Lockel, le gwoka n’est pas une musique tonale… enfin pas vraiment.

Mais pour comprendre la déclaration de Lockel, il faut surtout la mettre dans son contexte historique. Le guitariste a créé le gwoka modènn en pleine lutte indépendantiste et sa musique est avant tout militante. Comme il le dit lui même, c’est une « musique de lutte de classes au service des ouvriers et des paysans guadeloupéens. » C’est une musique anticolonialiste qui cherche à exprimer l’âme musicale guadeloupéenne. En déclarant le gwoka comme musique atonale, M. Lockel marque avant tout une rupture avec les conventions et les gouts occidentaux. C’est une déclaration d’indépendance qui, à mon avis, a plus de valeur symbolique que de capacité descriptive. En déclarant le gwoka modal, Lockel le regroupe avec les traditions africaines et asiatiques. Il le dit d’ailleurs de façon très clair dans le paragraphe cité ci-dessus. Là, le geste est à la fois symbolique et descriptif. Enfin, en créant une musique qu’il décrit comme modènn (moderne), atonale et modale, Lockel démontre qu’il est capable d’adopter le langage d’un modernisme cosmopolite et de l’adapter afin de servir un mouvement d’émancipation culturel et politique. Dans ce contexte, le gwoka est sans aucun doute une musique atonale-modale.

Pourquoi ce blog? Why this blog?

J’ai deux raisons principales pour commencer ce blog. Après plus de quinze ans aux Etats-Unis, je me rend compte que mon français s’est beaucoup détérioré et que le meilleur moyen de contrecarrer la chose, c’est de m’en servir plus souvent. De plus, cela fait maintenant deux ans que j’ai fini ma thèse et je suis tout a fait conscient que, étant en anglais, elle est inaccessible à la plupart des musiciens, danseurs, et militants culturels guadeloupéens qui m’ont tant aidé dans mon travail de recherche. J’ai donc décidé de faire d’une pierre deux coups: de me forcer à écrire en français et de le faire surtout pour enfin mettre mon travail à la disposition des Guadeloupéens.

J’espère que ces écrits attireront aussi l’intérêt d’autres lecteurs francophones comme anglophones qui souhaitent en connaitre plus sur la Caraibe et les Antilles françaises en particulier. Pour cela, certains blogs seront en français, d’autres en anglais. Je voudrais surtout me servir de ce forum pour discuter musique, littérature, politiques, mais aussi pédagogie. Et vous, qu’avez-vous envie de lire? De quoi voudriez-vous qu’on parle? 

English

I have two main reasons for starting this blog. The first stems from the recognition that, having lived in the US for over 15 years, my French has greatly deteriorated and that the best way to reverse that trend is to make sure that I use my native tongue more often. Second, two years after finishing my dissertation, I am painfully aware that, untranslated, it is of little value to the Guadeloupean musicians, dancers, and cultural activists who have taught me so much over the past several years. It is time that I start giving back by sharing some of my work with them in a language they can understand. But I also hope that this blog will eventually attract both Francophone and Anglophone readers interested in learning more about the Caribbean, especially the French Antilles. I plan on focusing mainly on music but also to cover literature and politics, as well as pedagogy. What about you? What would you like to read? What topics would you like to see covered here?