Bonjour à tous!
Cela fait déjà six mois que je n’ai rien ajouté sur ce blog, au point où certains pourraient se demander si je n’avais pas tout simplement abandonner mes efforts. Il n’en est rien. La Guadeloupe, et la Caraïbe plus généralement, continuent d’être au centre de mes activités professionnelles, aussi bien au niveau de la recherche que de l’enseignement. Faisons le point.
L’année 2013 a été pleine de changements pour moi, le plus important étant ma nomination au poste d’assistant professor dans le département d’anthropologie à l’Université du Wisconsin-Madison. Suite à ma visite en Guadeloupe en Juillet, j’ai donc quitté, non sans quelques regrets, Los Angeles et UCLA et pris la longue route vers les Grands Lacs. La transition n’a pas été sans peine: nouveau boulot, nouvelle ville, nouveau climat, mais aussi, et c’est plus important, nouvelle discipline. N’ayant pas, à la base une formation d’anthropologue, il m’a fallu m’ajuster à de nouvelles façons de faire les choses, de nouvelles perspectives et de nouvelles conversations. Plus concrètement, il me faut maintenant créer de nouveaux cours qui ne portent pas nécessairement sur la musique. Comme vous pouvez l’imaginer tout cela ouvre l’esprit, crée de nouvelles opportunités, mais aussi prend du temps, ce qui m’a forcé à mettre de côté ce blog pour quelques mois.
Cependant la recherche continue. J’ai participé à un panel sur le patrimonialisation de la culture au congrès annuel de l’American Anthropological Association au mois de novembre à Chicago. Ma communication portait sur la dimension politique de l’inscription du gwoka sur la liste du PCI de l’UNESCO. Elle devrait débaucher sur un article pour la revue Journal of Heritage Studies. Je vous donnerai plus de détails dans un futur post.
Ma participation à AAA m’a aussi permis de renouer le dialogue avec l’anthropologue Yarimar Bonilla et ensemble de réfléchir sur la situation politique de la Guadeloupe et des autres territoires non-indépendents de la Caraïbe. Lors d’une excellent communication, Yari a posé la question suivante: « Peut-on envisager une forme de souveraineté pour les territoires colonisés qui ne soit pas forcément lié à la création d’un état-nation indépendant? » Je suis convaincu que la Guadeloupe, et plus particulièrement toutes les activités et débats autour du gwoka, offrent des pistes pour répondre à cette question. Je suis donc en train de l’intégrer cette à mon travail de rédaction de mon livre sur le gwoka qui va présenter son évolution comme expression d’abord nationaliste puis post-nationaliste, par quoi j’entend prendre en compte à la fois le désir d’établir une nation Guadeloupéenne et la réalité d’une appartenance à – et d’une dépendance envers – l’état français. La Guadeloupe peut-elle exister en temps que nation au sein de l’état français?
Plusieurs d’entre vous m’ont demandé d’écrire et de publier en français. Vous serez content d’apprendre que j’ai accepté d’écrire deux chapitres pour une Anthologie de la musique guadeloupéenne, publiée sous l’égide du Conseil Regional. Ces chapitres vont présenter deux aspects de ma recherche. Le premier porte sur le gwoka et le mouvement indépendantiste, mettant l’accent sur le travail novateur de Gérard Lockel. Le second se penche sur les liens, contestés ou revendiqués, entre le gwoka et le jazz au sein de ce que Paul Gilroy appelle l’Atlantique Noir.
Sinon, j’ai aussi des projets pour ce blog. En juillet dernier, Marie-Héléna Laumuno a accepté de faire un entretien avec moi où elle présente son travail sur le gwoka. Cet entretien sera publié ici prochainement. J’ai aussi un projet d’écrire un court essai qui reprenne les thèmes de l’article de Richard Price sur les petits lolos et la mondialisation. Qu’en est-il au 21eme siècle, alors que les grandes surfaces se multiplient en Guadeloupe et en Martinique et que la consommation est au centre des revendications sociales?
Voilà pour mes projets. Comme j’espère vous pouvez le voir, la Guadeloupe est peut être loin mais elle reste – et vous tous avec elle – au centre de mes préoccupations et de ma vie quotidienne. Je vous souhaite donc à tous une très bonne année en espérant qu’elle sera pleine d’opportunités pour nous de renouveler le dialogue que nous avons commencé il y a maintenant six ans lors de ma première visite à Sainte Anne.